lemiroirdespoetes

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paul Éluard


Poésie ininterrompue

II

 

Le poids d'un chien sortant de l'eau 

Comme un sourire ému d'une brouille d'amis 

Miroirs brisés miroirs entiers 

 

Le poids toujours nouveau

D'une chatte duvet

Les griffes sous la mousse

 

Et le poids flamboyant 

D'une chatte écorchée 

Par un fourreau d'aiguilles 

 

Le poids du jour qui réfléchit 

Et qui s'arrête comme un âne 

A chaque pas

 

Et je ramasse avec lui

Les miettes de son effort

Sempiternel

 

D'où sommes-nous sinon d'ici 

Et d'ailleurs toujours en butte

A ce compte monotone

D'armées et de solitaires

 

Bain d'abeilles paravent

De la poussière immuable

Balance des hirondelles

Dans une poitrine vide

 

Ane chèvre jusqu'à l'herbe 

Rat de la poupe à la proue

Rossignol jusqu'au déluge 

Jusqu'aux étoiles éteintes 

 

Sont pesants les rongeurs

Pesants comme une horloge

Et les poissons pêchés 

Et l'hermine par sa blancheur

Et le lièvre par son repos

 

Je suis avec toutes les bêtes 

Pour m'oublier parmi les hommes

 

Paul Éluard 

 


11/10/2021
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L'âge de la vie

III

 

Pourtant ce tout petit miroir

Pour y voir en riant les deux yeux œil par œil

Et le nez sans rien d'autre 

Et le bout de l'oreille et le temps de bouder

Ce miroir sans limites

Où nous ne faisions qu'un avec notre univers 

Ce tout petit miroir où jouaient avec nous

Une par une mille filles

Mille promesses définies 


03/09/2021
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L'âge de la vie

II

 

Nous avons eu huit ans nous avons eu quinze ans

Et nous avons vieilli noirci l'Aube et la vie 

 

Les hommes et les femmes que nous n'aimions pas

Nous n'y pensions jamais ils ne faisaient pas d'ombre 

 

Mais nous avons vieilli le gouffre s'est peuplé 

Nous avons reproduit un avenir d'adultes 

 


03/09/2021
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L'âge de la vie

I                      à René char 

 

Matin d'hiver matin d'été 

Lèvres fermées et roses mûres 

 

Déchirante étendue où la vue nous entraîne

Où la mer est en fuite où la plage est entière 

 

Soir d'été ramassé dans la voix du tonnerre

La plaine brûle et meurt et renaît dans la nuit

 

Soir d'hiver aspiré par la glace implacable 

La forêt nue est inondée de feuilles mortes 

 

Balance des saisons insensible et vivante 

Balance des saisons équilibrée par l'âge 

 


03/09/2021
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