Cahier de poèmes
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La campanule est la fleur la plus suave
Ondoyant dans l'air de l'été
Ses clochettes ont le suprême pouvoir
D'apaiser le souci de mon âme
Il y a dans la pourpre bruyère un charme
Trop violemment tristement cher
La violette a une haleine parfumée
Mais le parfum ne peut égayer
Les arbres sont nus le soleil est froid
Et peu si peu souvent visible
Les cieux ont perdu leur ceinture d'or
La terre sa robe de verdure
La glace sur le ruisseau scintillant
A jeté son ombre grise
Au loin collines et vallées semblent
Drapées d'une brume gelée
La campanule ne peut plus me ravir
La bruyère a perdu sa fraîcheur
Les violettes au fond du vallon
N'exhalent pas de douce odeur
Mais si j'ai regret de la bruyère
Il vaut mieux qu'elle soit loin
Je sais comme vite afflueraient mes larmes
A la voir sourire aujourd'hui
Et cette fleur sauvage qui si timide
Cache sous la pierre moussue
Son arôme et son œil mouillé de rosée
Je ne gémis point sur elle non plus
Mais sur la svelte et majestueuse tige
Le bleu argent des pétales
Que les boutons celaient tel un saphir
Dans un écrin d'émeraude
Ce sont eux qui versent sur mon cœur
Un charme calme et lénifiant
Qui s'il fait monter aux yeux les larmes
A pouvoir d'apaiser tout autant
Eux que je pleure, d'eux séparée si longtemps
Pendant le morne jour d'hiver
Pleure avec nostalgie mais surtout quand l'errance
Sur des rives flétries me conduit
Si glaciale alors la lumière décline
Au bas du morne ciel
Et dore le mur suintant et assombri
D'un lustre passager
Oh que je languis, oh que je soupire
Après la saison des fleurs
Et fuis cette lueur qui s'éteint
Pour lamenter les champs du pays
18 décembre 1838